Du phénotype à la biologie moléculaire – couleur chat

Conférence du Dr Heather R Roberts « Les couleurs de robe : du phénotype à la biologie moléculaire »
Sierra College in California, USA

Notes prises lors de la Convention Internationale Féline Royal Canin des 13, 14 & 15 avril 2010

Sans doute le travail de sélection génétique d’une couleur de robe peut sembler moins vital que celui lié à la santé ou au tempérament. Toutefois c’est un point assez complexe qui réserve des surprises et mérite qu’on s’y intéresse un peu, pour orienter la sélection du mieux possible. 

L’héritage génétique est porté par l’ADN qui se compose de gènes. Chaque individu possède le gène sous deux formes qu’on appelle allèles, l’un issu de la mère, l’autre du père.

Parmi les allèles d’un même gène, certains sont dominants et d’autres récessifs. C’est ce phénomène qui rend l’individu unique. En effet :
L’allèle dominant s’exprime que l’individu soit homozygote (les deux allèles sont identiques), ou hétérozygote (les deux allèles sont différents) pour ce gène ;
L’allèle récessif ne s’exprime qu’à l’état homozygote, car sinon son expression est masqué par le dominant.

L’allèle dominant est représenté par une lettre majuscule, alors que l’allèle récessif s’écrit en lettre minuscule. Le génotype est l’information portée par les gènes, alors que le phénotype est l’expression visible de ce génotype.

Les variations ADN sont dues à plusieurs facteurs :

L’héritage/l’environnement/le hasard > ce qui aboutit à la mutation, seule source d’évolution possible de l’espèce, de la race, de la lignée.

Chaque robe chez le chat est le résultat de l’action simultanée de plusieurs gènes situés à différents endroits sur les chromosomes (on appelle loci, la place du gène sur le chromosome).
Certains sont clairement identifiés, d’autres sont plus sujet à controverse et mériteraient une étude plus approfondie.
Ci-dessous les 8 principaux gènes codant pour la couleur de robe chez le chat.

Le locus agouti (s'écrit A si dominant; a si récessif)

Il s’exprime par l’aspect tabby ou monochrome parfait de la robe :
> Le phénotype tabby indique la présence d’au moins un allèle dominant. Le génotype est donc : AA ou Aa (dans ce cas l’allèle récessif est masqué par le dominant); si le gène est AA ce sera un agouti homozygote, s’il est Aa il sera hétérozygote.
> Le génotype aa va donner une couleur unie (solide).

Le locus noir (black)

Il existe trois allèles pour ce gène : B, b et b1, qui codent respectivement pour les couleurs noir, chocolat, cinnamon par ordre décroissant de dominance (ainsi, B>b>b1).
Un chat de phénotype noir peut être de génotype BB, Bb ou Bb1 puisque les allèles b1 et b sont récessifs, b1 étant récessif de b. On ne pourra identifier le génotype que lorsque le chat aura reproduit, sur plusieurs portées ou via un test génétique.
Le chat chocolat pourra être bb ou bb1
Le chat cinnamon, lui, ne peut être que b1b1. 

Le locus dilué

Il agit en provoquant un très petit changement sur le gène précédent : il provoque la dilution de la couleur obtenue par l’action du gène noir. On obtient alors :

noir > chocolat > cinnamon
bleu > lilas > fawn 

Le locus albinos (C, cb ou cs)

C = couleur pleine Le génotype cb/cb donne un phénotype sepia, une très légère différence de ton entre les extrémités, le masque foncés et la robe (à l’image des Birmans qui ont donné la lettre b à cet allèle) cb/cs : une variation plus prononcée entre extrémités et robe cs/cs : le colourpoint du Siamois (qui a donné le s dans cs)

Le locus silver

C’est un gène inhibiteur, qui interrompt la régularité de la coloration. Il en existe deux allèles : I et i. Sous son effet un poil uni acquiert une base blanche ou argentée, l’extrémité restant de la couleur d’origine. Il semble toutefois que ce gène soit plus complexe que l’on a pu le penser jusqu’à présent.

Le locus du white spotting (S ou s)

Quand le chat présente un très grand nombre des taches blanches, S est présent; quand il n’y en a pas ou très peu, c’est que s s’exprime (génotype : ss).

Le locus blanc dominant (W, w)

W : le chat est blanc, car il y a une absence totale de pigments dans le pelage. w: le chat n’est pas génétiquement blanc

Si le chat est WW il apparaît blanc, et s’il est ww il n’est pas blanc.

Un chat Ww apparaît blanc mais génétiquement il ne l’est pas. Les yeux vous renseigneront : s’il a les yeux cuivre il est sûrement silver tabby et pourra avoir une descendance brown tabby. Des yeux vairons, dont un vert, indiqueront qu’il est plutôt sealpoint ou brown tabby/white.

W est un gène épistatique (il s’impose sur les autres gènes). 

Le locus rouge (O/o)

Le rouge ou orange est le résultat de l’action d’un gène présent au locus orange Ce gène est porté par le chromosome X et il en existe deux versions : O (codant pour la couleur rouge, ou orange) et o. Combiné avec le gène de dilution (d/d) on obtient un crème. Tous les mâles et femelles possédant au moins un chromosome X, ils peuvent tous être porteurs d’un O ou o.
Les mâles ne possèdent qu’un seul exemplaire du chromosome X : ils sont donc « rouges » s’ils portent O. Le second chromosome sexuel étant Y, leur génotype s’écrit : OY.
Si le mâle n’hérite pas du gène rouge dominant de sa mère, il sera oY et ne sera pas « rouge ». Les femelles, qui elles possèdent deux X, ont trois combinaisons possibles :
o/o, pour des robes non rouges
O/O, pour des robes rouges

O/o qui donnent la robe écaille de tortue. Celle-ci résulte du phénomène d’inactivation du X : dans chaque cellule, l’un des deux X devient inactif. Si le O devient inactif, la cellule sera noire, si le o devient inactif, la cellule sera rouge.

Certains gènes demandent à être plus profondément étudiés : 

Le locus tabby

Il détermine le type de « dessins » sur une robe agouti dominante noté A/- (le deuxième allèle étant inconnue). On a plusieurs types de patrons : 
Ta : ticked, bien qu’on pense qu’il puisse s’agir d’un gène réellement différent à ce jour

T : mackerel/spotted
tb : marbled ou blotched Ta>T>tb
Chez le Bengal, on remarque depuis une vingtaine d’années, des variantes des « patrons » qui laissent à penser que des modificateurs sont à l’oeuvre. Les chercheurs pensent que le Ta serait en réalité sur un locus différent.
La recherche génétique manque cruellement de fonds, car son objectif n’est pas vital pour la médecine vétérinaire, voire utile en médecine humaine; les remontées des observations des éleveurs sont donc cruciales.
On a ainsi pu faire les avancées suivantes :

Le locus merle (noté M/m bien qu'on préfère le rebaptiser pommelé ou dapple en anglais)

Il existe peu de chats red silver ou red silver tabby : on observe la couleur silver à la base des poils près de la peau, la couleur est plus claire et le plus foncé est dominant. Le chat (souvent des bobtail japonais, certains maine coon et siberian) présente deux tonalités d’une même couleur, un peu comme les robes merle chez le chien (dogue arlequin, robe des bergers australiens, certains teckels,..) ou chez certaines variétés de souris.

Quand la couleur est eumélanistique, on a des bleu merle, quand elle plutôt phaéomélanistique, des merle rouges.

m/m : ne donne pas de merle M/m et M/M donnent des merle

A noter que des affections sont liées à ce gène chez le chien, comme la cécité. 

La couleur ambre (récessive)

Elle serait issue de l’activité d’un locus appelé Extension (e) en lien avec l’action de la tyrosinase. Si cette activité est faible, on obtient de la phaéomélanine, si l’activité est forte, on a de l’eumélanine. On a des chatons assez foncés à la naissance, qui naissent noir ou bleu, mais progressivement la couleur s’éclaire et ils deviennent ambre ou ambre clair. Ces chats reproduiront noir et bleu sans rouge ou alors avec quelques traces sur les extrémités : queue, dessous des pattes…

HELKI, un nouveau locus

Découvert en Californie du Nord, il a donné son nom (d’origine indienne) à une mutation de la fourrure récemment découverte chez une éleveuse. Le faible nombre d’individus ne permet pas pour l’instant d’affirmer avec certitude les aspects récessifs. L’éleveuse a observé une mortalité assez élevée mais les chercheurs avant d’établir le lien avec le gène doivent éliminer les autres causes « classiques » de mortalité en élevage (qualité et hygiène, infections,…);

Il se traduit par un aspect extrêmement laineux du poil long et mi-long, présent très tôt chez le jeune chaton, qui disparaît vers 6 mois puis revient à 8 mois.

Les premières études indiqueraient un caractère récessif très présent chez les mâles, moins chez les femelles.

Il existe des tests génétiques pour plusieurs des gènes cités au cours de cet exposé, il faut se renseigner dans son pays, sur internet, auprès de son vétérinaire. 

« courtoisie Royal Canin »

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